Cristina Derache, chef roumaine à Paris
Au « Crion Chez Cristina », qu’elle a ouvert en 2013 la jeune cheffe roumaine Cristina Derache apporte aux codes de la bistronomie une touche piquante d’exotisme. Une singularité qui doit beaucoup au parcours hors normes de cette Parisienne d’adoption.
DE LA CUISINE ET DE L’AMOUR
Amoureuse de Paris, de la cuisine française, des produits du terroir hexagonal... Cristina Derache n’a que le mot « amour » à la bouche. À 33 ans, cette jeune cheffe roumaine cuisine avec son cœur autant qu’avec ses tripes. Est-ce l’ingrédient secret de ses petits plats raffinés sans être snob, francs sans jouer les canailles, simples sans tomber dans les clichés… ? Lacuisine de Cristina Derache a quoi qu’il en soit hérité de son caractère passionné et bien trempé.
Il y a cinq ans, la cheffe ouvrait son premier restaurant, « Chez Cristina », rue du Nil à Paris. Dans cette ville où les cuisines de toutes les nationalités se côtoient, Cristina Derache parvient à créer la surprise avec une spécialité gastronomique roumaineméconnue : le sarmale, plat national composé de feuilles de chou farcies de riz, de viande et d’oignons. La cheffe se fait rapidement une réputation enviable et se voit même décerner par bon nombre de critiques le titre de meilleur restaurant roumain de Paris.
Elle vante avec enthousiasme le cosmopolitisme culinaire de son pays : « La Roumanie partage 7 frontières avec des pays étrangers : c’est un patchwork d’influences latines, slaves, byzantines et orientales. La cuisine roumaine est très proche de la cuisine turque, mais aussi très marquée par les saveurs méditerranéennes », raconte Cristina Derache. Avant d’ajouter avec humour : « L’ail est omniprésent dans les menusroumains. N’oublions pas que c’est le pays de Dracula ! »
HORS DES SENTIERS BATTUS
Cristina Derache a suivi une voie peu classique. Sa jeunesse à Constanta, sur les rives de la mer Noire, a été marquée par la pénurie alimentaire qui régnait dans la Roumanie de Nicolae Ceausescu. « Contrairement à la plupart d’entre nous, je n’ai pas des souvenirs d’enfance sur lesquels m’appuyer en cuisine. La gastronomie roumaine était quasiment inexistante durant la dictature. Ce n’est qu’à partir de la révolution de 1989 que les premiers produits importés ont fait leur apparition. J’ai alors 10 ans et je découvre émerveillée ces saveurs nouvelles et exotiques. Je crois que ma passion pour lacuisine vient de là. »
Un choc sensoriel à effet lent. Il faudra attendre encore 18 ans pour que Cristina Derache endosse sa première toque de cheffe. Avant cela, c’est côté salle que la jeune femme intègre le secteur de la restauration. Tous les étés, dès l’âge de 16 ans, Cristina Derache fait ses armes comme serveuse à Constanta, désormais ouverte au tourisme.
DE LA SALLE AUX FOURNEAUX
À 21 ans, elle s’offre des vacances dans la Ville Lumière : « Je suis littéralement tombée amoureuse du lieu. J’ai décidé de faire ma vie ici. Aujourd’hui, 10 ans après, Paris me fait toujours le même effet. Je ne pense pas un jour retourner vivre enRoumanie. » En France, Cristina Derache enchaîne les expériences dans divers établissements gastronomiques parisiens.
Jusqu’à l’aventure de « Chez Cristina », qui va lui donner l’occasion de révéler ses talents de cheffe. « Un jour, on s’est retrouvé sans chef de cuisine et j’ai été obligée d’assurer le service. Je suis donc passée derrière les fourneaux par hasard… et pourtant, aujourd’hui je ne me verrais pas ailleurs. » Perfectionniste, elle ne se repose pas sur ses lauriers : elle s’offre une formation de pâtissière à l’école Le Nôtre. Elle se met à pratiquer une cuisine plus sophistiquée et s’ouvre à d’autres influences.
RETOUR GAGNANT
En 2013, Cristina Derache ouvre le « Crion Chez Cristina », son nouveau QG dans le nord de la capitale. « Avec mon associée Magali, nous sommes arrivées à la conclusion qu’il fallait faire évoluer la cuisine de ‘Chez Cristina’ pour ne pas tomber dans le cliché. C’était aussi une motivation sentimentale : en tant que cheffe, je ne me retrouve plus dans la cuisine roumaine. J’ai envie de proposer à mes clients quelque chose qui me ressemble. »
Désormais, la carte de Cristina Derache ne connaît plus de frontières : ceviche péruvien, curry vert thaïlandais, gaspacho andalou et bœuf de Salers se côtoient dans une parfaite harmonie. Le rapport qualité-prix est imbattable pour la capitale : 18 euros la formule entrée-plat-dessert. Dans ce coin du 18e arrondissement qui n’a pas encore été touché par la mode des néo-bistrots, le « Crion chez Cristina » fait le bonheur d’une clientèle de bureaux et de résidents. « Chaque semaine je compose une carte exclusive qui évolue au fil des saisons. Je découvre sans cesse de nouveaux produits et cela me passionne. Depuis l’ouverture il y a deux ans, j’ai l’impression de progresser chaque jour et de mieux me connaître grâce à la cuisine ! »
Crion Chez Cristina
9, rue Boucry – 75018 Paris
01 42 09 96 26 - [email protected]