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Affaires en France

Accompagner les femmes vulnérables à travers l’entrepreneuriat

 

Qui n’a jamais rêvé d’être son propre patron ? Chiara Condi a transformé cette ambition en projet social : dans son association Led by HER, cette Américaine expatriée à Paris encourage des femmes victimes de violences à devenir cheffes d’entreprise.

 

La rage de rebondir

« Pour tester le caractère d’un homme, donnez-lui le pouvoir », disait Abraham Lincoln. Sa compatriote Chiara Condi a mis ce précepte au féminin en créant l’association Led by HER, un incubateur solidaire qui accompagne des femmes dans leur projet de création d’entreprise.

Après avoir fait face à des difficultés dans la vie, les participantes du programme retrouvent la résilience en se reconstruisant professionnellement. Des femmes a priori fragiles, mais qui puisent dans la violence du passé la rage de rebondir. « Elles en tirent une force très estimée dans le monde de l’entreprise qui est le goût du risque, explique Chiara. Elles n’ont plus rien à perdre, alors tout devient possible. »

Se lancer dans la mode, le design ou la communication, ouvrir un garage automobile féminin, bâtir une crèche sur un terrain de golf… Les projets sont aussi variés que les profils des candidates : elles viennent de tous les milieux sociaux, ont tous les niveaux d’études, se comptent par dizaines de nationalités et ont entre 22 et 60 ans.

« Il y a quelques années, je considérais les problèmes liés à la situation féminine comme l’expression de problèmes socio-économiques plus complexes, confie Chiara. Mais j’ai réalisé que la pauvreté n’expliquait pas tout et que les mentalités au regard des femmes ne changeraient pas sans un certain coup de pouce. »

L’école des cheffes

Certaines associations proposent un soutien psychologique ou une assistance sociale aux femmes ayant subi des violences. La singularité de Led by HER est d’intervenir directement dans la phase de reconstruction. Au programme : une centaine de cours collectifs prodigués par des experts de l’entrepreneuriat (y compris par les professeurs des deux écoles de commerce partenaires, l’IÉSEG et ESCP Europe), un programme de mentorat sur trois ans, et des événements et conférences organisés régulièrement avec l’écosystème entrepreneurial et des entreprises partenaires.

Les places sont limitées : trente personnes par an, sélectionnées sur entretien de motivation. Le dispositif mobilise des ressources considérables : un conseil d’administration de dix personnes et deux cents bénévoles sont impliqués dans le projet qui en est à sa deuxième promotion. « Notre objectif est de leur donner les clés pour avancer. Tous les mois, nous organisons des événements avec d’autres incubateurs pour favoriser la création de réseaux professionnels et élargir les opportunités. »

 

Femmes de tête

Chiara est passée par les bancs de Harvard, de Sciences Po Paris et de la London School of Economics. Une élève brillante qui a très tôt trouvé sa voie dans l’économie sociale et solidaire. Encore étudiante aux États-Unis, elle met en place un programme de réinsertion sociale pour les sans-abri. Ce sont les prémices de Led by HER, qui verra le jour quelques années plus tard, non sans quelques difficultés.

« Dans la culture américaine, on voit les choses de façon plutôt cyclique : celui qui était au bas de l’échelle peut se hisser au sommet, c’est pour cela que tout est possible. C’est moins le cas en France. Il est important de ne pas lier ces femmes à leur passé car ce qui leur est arrivé ne les définit pas. Elles ont la capacité de tout construire dans l’avenir. »

Deux prestigieuses écoles de commerce parisiennes, l’IÉSEG et ESCP Europe, soutiennent l’initiative depuis le début. Elles mettent à disposition des salles pour les cours et les conférences. Aujourd’hui, Led by HER peut également compter sur un soutien financier de la mairie du septième arrondissement de Paris et sur le mécénat d’entreprises telles que Google.

L’opiniâtreté de Chiara n’a pas seulement fait tomber les préjugés, elle a aussi soulevé des têtes. « Je vois l’effet du temps : la posture de ces femmes a changé. Elles sont à la recherche d’opportunités, se sentent capables de conquérir le monde. »

Chiara mise sur la persévérance et l’envie de réussir. Enthousiaste, humaniste et pragmatique, elle possède une autre qualité particulièrement prisée chez les chefs d’entreprise : la vision à long terme.

« Qu’elles aient un passé de victime ou pas, toutes les jeunes entrepreneuses éprouvent des difficultés à lancer leur société. C’est pourquoi je suis en train de travailler sur un autre projet, une plateforme pour mieux permettre aux femmes de construire leurs projets d’entrepreneuriat. On ne parviendra à l’égalité hommes-femmes que si l’on crée des dispositifs qui vont dans ce sens. J’espère contribuer à faire bouger les lignes. »

 

[Crédit photos]

© Samuel Cortès