L’activité commerciale de la région de Koweït est attestée dix siècles avant notre ère. Ce n’est toutefois qu’au XVIIème siècle que le Koweït se constitue comme entité autonome, notamment avec l’arrivée de tribus en provenance d’Arabie. Le Golfe apparait alors sur les cartes européennes, à l’initiative d’ailleurs de cartographes français. C’est alors un passage obligé sur la route des Indes et la France y conteste la suprématie britannique.
Les premiers contacts entre les autorités officielles françaises et koweïtiennes ont lieu à la fin du XVIIIème siècle. En 1778, un émissaire français envoyé auprès des autorités françaises de Pondichéry, alors sous le feu anglais, est capturé en chemin aux alentours de Bassorah (actuel Irak) par des nomades qui le relâchent au Koweït où il se met sous la protection de Cheikh Abdallah, fils de Sabah Ier ; ce dernier est le tout premier cheikh du Koweït, devenu une entité nationale souveraine, dirigée par la famille des Sabah (actuelle famille régnante), choisie librement par les familles marchandes locales pour les gouverner. La même hospitalité sera accordée peu de temps après à Jean-François Xavier Rousseau (neveu du philosophe des Lumières), consul à Bassorah, celui-ci s’étant enfui de la ville avant sa destruction par les Perses.
Dès lors, la position d’ouverture du Koweït est connue ; cette ouverture permet à la région de devenir, au cours du XIXème siècle, un carrefour maritime entre les Indes, l’Europe et l’Empire ottoman, notamment grâce au commerce des chevaux arabes, utilisés à des fins militaires, et des perles.
Les relations entre le Koweït et la France se développent ; elles sont essentiellement commerciales et permettent à l’influence de notre pays de s’y ancrer. Des témoignages relatent qu’au milieu du XIXème siècle, Cheikh Sabah II était un fidèle lecteur de l’"Oriental Paris Gazette". Le commerce de la perle est à ce point florissant qu’il permet alors à certains bijoutiers français, reconvertis dans l’immobilier, de transformer l’avenue des Champs-Elysées et certains de ses hôtels particuliers, pour en faire ce qu’ils sont encore aujourd’hui.
La première moitié du XXème est marquée par la découverte de l’or noir dans la région ; c’est en 1938 que le pétrole est découvert au Koweït. Et ce sont principalement les Britanniques qui en profitent, en développant l’industrie pétrolière, qui permettra l’essor de l’économie koweïtienne après la Seconde Guerre mondiale.
De l’établissement des relations diplomatiques à la Guerre du Golfe
Le Koweït proclame son indépendance le 19 juin 1961 et la France la reconnait le 28 août. Elle y accrédite d’abord son ambassadeur au Liban, avant d’y nommer un ambassadeur résident en juillet 1968.
Dans les années qui suivent, le Koweït devient l’un de nos premiers fournisseurs de pétrole (4ème rang à la fin des années 1960).
Les relations bilatérales continuent à être empreintes de respect, d’amitié et de confiance, notamment grâce aux positions adoptées par la France lors des différentes phases du conflit israélo-arabe ; cette confiance permet notamment une coopération forte et le développement de marchés dans le domaine militaire et de l’armement.
Les Koweïtiens manifestent le désir de développer leurs relations économiques et techniques avec la France. De leur côté, quelques entreprises françaises prennent pied sur le territoire koweïtien. Des étudiants koweïtiens sont accueillis en France alors que les Koweïtiens marquent leur intérêt pour le français ; une école française ouvre à Koweït dès septembre 1968. Un accord bilatéral de coopération culturelle est signé en 1969.
Dans un tout autre registre, que l’on soit amateur de football ou pas, on se souvient encore de l’épisode cocasse d’un match de la Coupe du monde de 1982 opposant le Koweït à la France, au cours duquel feu Cheikh Ahmad Al Fahd, le frère de l’actuel Emir, était descendu sur le terrain pour faire annuler un but français controversé.
Le tournant dans les relations a lieu en 1990 avec l’engagement de la France au sein de la coalition qui libère le Koweït de l’invasion irakienne, avec la participation de 4 000, puis 7 000 et jusqu’à 14 700 militaires français participant à l’Opération Daguet (été 1990 - février 1991). La France y déplore un certain nombre de morts et de blessés.
Vers un partenariat de long terme
Depuis plus de 20 ans, le Koweït nous sait gré de cet engagement ; la fraternité d’armes aura tissé un lien politique fort entre nos deux pays, illustré par de nombreuses visites bilatérales, comme celles du Président Sarkozy au Koweït en février 2009 ou du Premier ministre koweïtien en France en avril 2010.
Ce lien est renforcé en octobre 2009 par la signature d’un accord de défense entre nos deux pays qui jette les bases d’un partenariat stratégique. Celui-ci couvre de nombreux domaines : des exercices militaires conjoints, la formation en France de personnels militaires koweïtiens, la participation de la France à la réparation et à la remise en service de matériel militaire français de l’armée koweïtienne ; à ce titre, l’une des principales bases militaire koweïtienne accueille près de 60 personnels français.
Sur le plan économique, la France a toute sa place sur le marché koweitien, d’autant plus qu’elle possède de nombreuses qualités reconnues (industrie de haute technologie, tourisme attrayant, langue perçue comme prestigieuse, enseignement de qualité, opportunités d’investissements).
Le lancement récent de grands projets dans le cadre du Plan quadriennal de développement (127 Mds $ sur les années 2010-2014) témoigne d’une nouvelle dynamique au Koweït et ouvre des perspectives particulièrement prometteuses pour les entreprises françaises, petites, moyennes ou grandes, notamment dans les secteurs de l’énergie, de l’environnement, des transports et des infrastructures : le pays envisage de lancer 413 projets d’ici la fin de l’année fiscale 2012-2013 pour un montant total de 11 Mds € (future station de dessalement d’eau, nouveau terminal de l’aéroport, nouveau campus de l’université du Koweït, construction de 8 hôpitaux, métro du Koweït, etc...).
L’implantation au sens strict d’entreprises françaises est en plein essor ; même s’il y a encore trop peu d’investissements directs français au Koweït (entre 65 et 77 M€/an depuis 2005), on trouve une vingtaine de filiales (Alstom, Air liquide, Alcatel Lucent, Air France Cargo, DCI Cofras, Egis, Thalès, BNP-Paribas, Carrefour…). Notre présence locale est également dynamisée par l’installation de bureaux de représentation ou de franchises, notamment dans les secteurs des biens de consommation et des services (Paul, Fauchon, Ladurée, Chanel, Christian Dior, Yves Saint-Laurent, Louis Vuitton, Danone, Elle & Vire, …).
En 2011, la France a dégagé un excédent commercial de 181 M€ avec le Koweït, les produits manufacturés et agroalimentaires représentant la plus grande part des exportations françaises vers le Koweït, pour un montant de 324 M€. Ces chiffres placent notre pays au 10ème rang des fournisseurs du Koweït, avec une part de marché de 3,3 %. Le Koweït a, quant à lui, exporté en France essentiellement (96 %) des hydrocarbures pour un montant de 143 M€ et est présent dans notre pays au travers des investissements publics et privés évalués à plus de 10 Mds $ (essentiellement immobilier et capital-risque). Enfin, le fonds souverain koweitien, Kuwait Investment Authority (KIA) a pris récemment une participation dans le capital d’Areva.
L’année 2011 aura aussi été marquée par la visite de deux Ministres des Affaires étrangères, Mme Alliot-Marie en février pour le triple anniversaire de l’Indépendance du pays (50 ans), de la Libération (20 ans) et de l’accession de l’Emir Sabah IV au trône (5 ans), et M. Juppé en novembre pour le Forum pour l’Avenir et le Partenariat de Deauville. Le Forum pour l’Avenir est une enceinte de discussion entre les pays du "Moyen Orient élargi", ceux du G8 et quelques autres pays partenaires pour évoquer des sujets d’intérêt général commun. L’édition 2011 de ce Forum, co-présidée par le Koweït et la France, a par exemple tenu des ateliers sur la parité, la participation des jeunes à la vie politique ou encore la responsabilité sociale des entreprises, etc.
Enfin, l’excellence de cette relation a permis la naissance, le 1er janvier 2012, de l’Institut Français du Koweït, véritable vecteur de notre diplomatie d’influence et culturelle dans le pays.
Sources : Les relations franco-koweïtiennes à partir de 1788, Yacoub Y. Al-Ibrahim - Documents diplomatiques français