La Nasa analyse le sol martien avec du matériel français
Depuis quatre ans, le rover « Curiosity » sillonne Mars à la recherche de traces de vie et de métaux rares. À son bord, une caméra laser et un laboratoire d’analyses miniature développés entièrement ou en partie par des équipes françaises.
Seul sur Mars
Le 6 août 2012, la mission Laboratoire scientifique sur Mars (MSL) se posait sur la planète rouge avec à son bord un laboratoire mobile à la pointe de la technologie : le rover « Curiosity ». Depuis, celui-ci arpente sans relâche le sol martien et a déjà parcouru plus de treize kilomètres. Fin mars 2016, « Curiosity » a entamé la traversée du plateau de Naukluft. L’objectif : étudier les formations rocheuses situées de l’autre côté de cette zone accidentée de 400 mètres de large. La mission MSL peut compter pour cela sur plusieurs technologies françaises. Deux des dix instruments embarqués sur le rover d’exploration ont en effet été entièrement ou partiellement conçus par la France.
Des outils à la pointe de la technologie
La ChemCam, installée au sommet du mât de « Curiosity », forme en quelque sorte la tête du robot. Cette caméra équipée d’un laser et de spectromètres (instruments permettant de mesurer le spectre de la lumière) est le fruit des travaux d’une équipe de l’Institut de recherche en astrophysique et planétologie (Irap) dirigée à Toulouse par l’astrophysicien Sylvestre Maurice.
Elle permet d’étudier la composition chimique du sol martien. Les roches sont chauffées à plus de 10 000 degrés Celsius par le faisceau laser tandis que la caméra capture la lumière qu’elles dégagent en se vaporisant. En analysant la nature du rayonnement lumineux émis par les roches pulvérisées, la ChemCam est capable de déduire de quels atomes elles étaient composées.
Dans le corps de « Curiosity », le boîtier Analyse d’échantillons sur Mars (SAM) fait office de laboratoire miniature. Son rôle : déceler des traces de vie sur la planète rouge. Lorsque des roches pouvant abriter les vestiges de formes de vie éteintes sont détectées par la ChemCam, des échantillons sont placés dans le SAM, qui les analyse à la recherche de molécules organiques. La méthode et le dispositif utilisés pour procéder à cette analyse ont également été développés par des Français, une équipe de l’université Pierre-et-Marie-Curie dirigée par le professeur Michel Cabane.
Une collaboration franco-américaine fructueuse
Depuis 2012, la ChemCam a effectué plus de 300 000 tirs laser et a permis d’étudier plus d’un millier de roches différentes. Sylvestre Maurice savoure ce succès historique : « C’est la première fois que la France conçoit un instrument pour aller sur Mars. Aujourd’hui, notre caméra laser est l’instrument le plus utilisé sur ‘Curiosity’ » expliquait-il au quotidien « La Dépêche » en janvier 2016. Aux commandes de la ChemCam depuis près de quatre ans, l’ingénieur et son équipe de l’Irap sont les premiers non-Américains à participer au pilotage d’une mission de la Nasa.
Un partenariat renouvelé : l’Irap et Sylvestre Maurice ont été sollicités pour envoyer le successeur de « Curiosity » sur Mars en 2020. Ce dernier sera équipé d’une SuperCam, version améliorée de la ChemCam, dont un modèle de démonstration devrait être acheminé depuis Toulouse vers les États-Unis fin 2016. Ses nouveautés : une imagerie en couleur et des spectromètres plus précis qui permettront d’analyser jusqu’à la nature des liens entre les atomes présents dans les roches. L’intégration définitive du dispositif au rover est attendue pour 2018.
Bandeau : © Nasa
Corps d’article : © DR