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Histoire d'Alumni - Portrait d'Eugenia GRAMMATIKOPOULOU

26 août 2024 Affaires
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1. Quel est votre parcours d’études ? 
J’ai fait ma scolarité au Lycée Franco-Hellénique Eugène Delacroix, puis des études de premier et deuxième cycles au Département de Langue et de Littérature Françaises de Thessalonique. J’ai bénéficié de l’appui de la Fondation Nationale des Bourses pour effectuer un semestre Erasmus à l’université de Strasbourg II (Département de Langues Étrangères Appliquées & Institut de Traducteurs, d’Interprètes et de Relations Internationales) et, par la suite, j’ai passé une année entière en Bretagne où j’ai mené parallèlement la rédaction de mon master et un stage dans l’enseignement. Ma thèse de doctorat (Théorie de la Littérature) et mon post-doc (Littérature Comparée), je les ai effectués à l’Université Aristote car je travaillais déjà à plein temps à Athènes et il m’était impossible de repartir en France.  


2. Qu’est-ce que vous ont apporté vos études en France ? En quoi votre passage en France a eu un impact sur votre situation actuelle ?
La fluidité et l’enrichissement linguistique, l’ouverture culturelle et l’aiguisement de la curiosité d’esprit, des lectures inédites et bien évidemment des amis et collègues précieux : Je n’aurais jamais pu soutenir une thèse sur André Pieyre de Mandiargues sans les longs séjours parisiens où je parcourais sans cesse les collections au rez-de-jardin de la BNF ou bien sans la générosité des chercheurs.euses avec lesquel.les on partageait la même passion pour la surréalisme. De même, mon année de stage dans l’enseignement public français, dans le cadre du programme Socrates – Lingua C, ainsi que ma fonction de Coordinatrice d’un programme Comenius ont beaucoup contribué pour obtenir un poste (CDI) d’enseignante de FLE et de GLE dans le privé juste après mon retour en Grèce. C’est bien dommage que ce programme d’initiation « guidée » au monde de l’enseignement et d’échange culturel in vivo, dont profitaient de jeunes diplômés à l’époque pour acquérir une première expérience professionnelle dans un pays-membre de l’Union Européenne, ne soit plus en vigueur. Combiner théorie et mise en pratique, mettre en contact élèves et personnel de différents coins de l’Europe (de préférence les moins privilégies), voyager, découvrir et faire découvrir aux plus jeunes : voilà ce que les ministères de l’éducation devraient encourager à tout prix pour faire face aux exclusions de toute sorte et promouvoir le gai savoir qui manque tant.


3. Aujourd’hui, où en êtes-vous dans votre carrière ? Que se passe-t-il en Grèce dans ce domaine et en quoi pensez-vous que la coopération internationale est importante dans ce domaine ? Parlez-nous des groupes internationaux de réflexion auxquels vous participez.
Après un service d’une bonne douzaine d’années au Département de Langue et de Littérature Françaises (à la section de littérature, qui est désormais supprimée) et par suite d’une réorientation progressive de mes domaines de recherche, j’ai postulé et j’ai obtenu une mutation au sein de l’Université Aristote. J’enseigne donc depuis mars 2022 en Sciences PO, où j’assure des cours interdisciplinaires partant de ma spécialité, la littérature comparée (i.e. Littérature et politique, Genre et politique etc.). Malheureusement, les Départements de Langues et de Littératures Étrangères du pays, à l’exception de celui d’anglais, subissent une diminution alarmante de leurs effectifs ces dernières années, suivant surtout le démantèlement systématique de l’apprentissage des langues étrangères dans l’enseignement public. Aussi, renforcer la coopération internationale, déconnecter le diplôme de l’éventualité d’une carrière de fonctionnaire public et promouvoir des perspectives professionnelles d’une plus vaste envergure et diversité me semble l’unique voie possible pour garantir la survie de ce genre d’études en Grèce. 
En ce qui me concerne, je suis membre de certaines sociétés (littéraires, culturelles, consacrées à la traduction littéraire, i.e. ELFe XX-XXI, SFLGC, ATLAS, Société des Amis de Cerisy-Pontigny etc.) qui, même pour les membres de l’étranger forcément moins actifs ou présents, constituent des réseaux d’échange et de collaboration d’une valeur inestimable.


4. Continuez-vous d’entretenir des liens de coopération avec la France ? Si oui, les quels ? 
Même si le passage à un département non-francophone rend ce genre de coopération moins fréquente, je n’ai jamais cessé de participer à des colloques, de contribuer à des revues, de donner des cours à des etudiant.es francophones via le programme Erasmus plus. Cependant, je maintiens un contact ininterrompu avec la France via ma qualité de traductrice littéraire, fonction que j’exerce depuis 2002. La collaboration avec des maisons d’édition de qualité me donne un motif de plus afin de suivre la production littéraire, (re)découvrir de remarquables écrivains qui méritent une (re)introduction auprès du public grec, orchestrer des numéros spéciaux, accueillir, accompagner et présenter des auteurs français qui visitent Athènes ou Thessalonique. 


5. Quels sont vos conseils pour ceux qui poursuivent leurs études ou cherchent un travail en France après leurs études ?
Voyager, bouger, combiner, se socialiser (in vivo et non plus via les réseaux) : scruter pour découvrir toutes les occasions offertes en sortant du cadre et des parcours ‘standards’, résister aux automatismes. Être inventif au point de se frayer un chemin surprenant, une voie introuvable dans les modules des programmes d’études, nonobstant la qualité et le statut des institutions. C’est pareil quand nous avons à constituer une bibliographie pour un mémoire : les sources internet et les catalogues numérisés sont bien utiles mais nous conduisent toujours vers la même direction : une belle balade aux rayons d’une bibliothèque, même chez des bouquinistes, peut cacher des trésors d’ouverture spirituelle ; c'est Umberto Ecco qui donne le premier ce conseil aux jeunes chercheurs.euses ! Il m’est arrivé d’être épatée par des ex-camarades et/ou étudiant.e.s qui avaient pensé à combiner leurs études de français avec une langue rare ou très parlée mais dure à apprendre ou bien avec un métier technique ou un loisir, un sport, allant de l’œnologie et du sous-titrage au cirque humain, à la création des vidéos animées et au dressage canin. Par leurs choix audacieux, ce gens-là ont transformé la galère de la carrière en un épanouissement continu, bien qu’au détriment de la sécurité professionnelle, des attentes de leur milieu familial et social ou de l’enrichissement. Selon moi, la satisfaction au travail vaut son pesant d’or. Notre monde qui passe vite du momentum de la multiculturalité à celui de la multipolarité a plus que jamais besoin d’individus et de collectivités souples, humbles et imaginatifs, libres d’idées préconçues et de complexes de supériorité. 




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